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Introduction

Publié par , le 9 mars 2007.





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Première journée

25 septembre 2000

 Gus. Massiah - Association Internationale de Techniciens, Experts et Chercheurs (AITEC), France

Je suis l’un des animateurs de l’AITEC qui fait parti de HIC-Europe. Beaucoup de ceux qui auraient pu participer à cette réunion sont à Prague, car nous sommes dans une période de mobilisation importante. Ces rencontres se situent dans le cadre de la résistance et des luttes contre la mondialisation libérale. C’est un honneur pour nous que des rencontres de ce type puissent avoir lieu dans des locaux universitaires. Ce n’est pas si fréquent que cela se passe à Paris, comparé à d’autres pays européens. Je vous souhaite la bienvenue et de bons travaux.

 Klaus Teschner -Habitat Forum/Berlin, Allemagne

Bonjour et bienvenue. J’espère qu’une discussion ouverte va permettre d’introduire des expériences présentées lors de la dernière session que tenue à Berlin. J’en étais l’un des organisateurs. Je vous présente Cesare Ottolini, coordinateur de HIC en Europe et président d’une association de locataires en Italie (Unione Inquilini), qui va introduire les débats.

 Cesare Ottolini - Coordinateur européen de Habitat International Coalition (HIC), Italie

C’est un monde composé de fantômes qui se réunit aujourd’hui ici, fantômes face à la rencontre des ministres européens du logement. Car jusqu’ici, nous n’avons pas eu confirmation du rendez-vous avec les ministres du Logement que nous avions demandée en tant qu’habitants, locataires, sans-abri ou mal-logés de l’Europe. Mais nous ne sommes pas des fantômes, parce qu’en réalité les problèmes que nous vivons dans nos villes, dans nos logements, ne sont pas des problématiques de fantômes. mais de personnes réelles.

Aujourd’hui, c’est le douzième anniversaire de la première rencontre des ministres européens du Logement qui, justement, s’était déroulée ici en France, à Paris. Et peut-être sont-ce les mêmes ministres du Logement qui se réunissent encore aujourd’hui. « Louis Besson, alors ; Louis Besson, encore ». Que s’est-il passé entre temps ? Les documents du dossier préparatoire distribué à chaque participant de ces journées contiennent des statistiques importantes qui donnent un peu un aperçu des choses qui se sont déroulées au niveau de l’Union Européenne concernant le respect du droit au logement. Ces données démontrent que le stock de logement rapporté à la population a augmenté. Mais une donnée est absente de ces statistiques, celle du nombre de sans-abri.

Des enquêtes informelles estiment à trois millions le nombre de sans-abri, alors qu’il y aurait entre quinze et dix-huit millions de mal-logés en Europe. Si nous ne pouvons pas trouver ces données dans les statistiques officielles, c’est parce que l’on ne parle pas de fantômes ! Hélas, on ne parle pas de ceux qui souffrent pendant que se déroulent ces rencontres de ministres. C’est pourquoi dans les recensements officiels, les enquêtes, les bureaux de statistiques, le nombre de sans-abri et de mal logés est toujours relégué au second plan. Nous avons donc une tache à accomplir : faire émerger l’existence des « âmes mortes ». Vous vous souvenez peut-être que dans la Russie d’antan, au commencement du siècle passé, il y avait des « âmes mortes », des habitants des campagnes qui n’étaient pas considérés comme des personnes, mais faisaient parties du terrain. On pouvait vendre le terrain, le louer, ou même le détruire sans tenir compte de leur existence. Les écrivains russes ont alors commencé à parler des « âmes mortes ». Nous ne sommes pas les « âmes mortes » de l’Europe, des logements, des immeubles, des villes. Nous sommes des personnes qui vivent et qui contribuent, si possible, ou ont envie de contribuer à former l’Union Européenne en tant qu’union des peuples, union des gens, union de personnes. C’est à dire une Europe sociale.

Dans ces données statistiques, on peut également constater qu’il y a eu une baisse du stock du logement social et, qu’au contraire, il y a eu une augmentation du coût du logement. Une autre chose importante à souligner est que la progression des coûts des logements sociaux a été la même que celle des logements du secteur privé. Donc, le secteur social du logement au niveau européen n’a pas été une vraie contre-tendance ou un véritable contre-poids face au marché.

Il y a une donnée qui est aussi évacuée. C’est celle concernant la présence des logements vacants. Nous avons quand même quelques pourcentages. Par exemple en Allemagne, le pourcentage de logements vacants est passé de 3% en 1993 à 7,5% en 1999. Ce qui constitue une énorme progression. Pourquoi cela se passe-t-il en Europe ? Parce que les politiques s’interressent surtout au marché, à la monnaie, à la marchandise. Le modèle de globalisation prend d’abord en compte le marché. Le logement est donc vu en tant que marchandise dont la ville est le marché. Pas de place au droit d’usage ni du droit à la ville : les citoyens , les personnes ont la seule dimension de consommateurs qui achètent un bien. Par conséquent, en général, l’Union Européenne ne promeut pas de réelles politiques du logement en faveur de la société : chacun pour soi, rien pour l’autre.

Il n’y a pas de subsidiarité entre les différents pays ni de véritable solidarité entre les politiques des différents pays de l’Union Européenne. Elle promeut la division internationale des marchés, mais n’a pas servit véritablement jusqu’ici à promouvoir le respect du droit au logement, à la ville, alors que cette division internationale des marchés a provoqué le transfert de certaines productions, qui ont provoqué et provoquent les crises urbaines dans certaines régions, crises qui se répercutent sur le logement. Pourquoi l’Union Européenne ne pourrait-elle pas faire intervenir ses fonds structurels pour soutenir certaines régions en crise ? En réalité, ils servent à soutenir certaines productions dans certaines régions.

Il est surtout nécessaire que les habitants d’Europe reprennent la parole, pas seulement au niveau local, ni au niveau national mais de plus en plus à celui de la région Europe, de l’Union Européenne qui va s’agrandir. Nous avons reçu des demande de participation d’habitants de Pologne, de Croatie, de Turquie, de Russie et d’autres régions de l’ex - Europe de l’Est. Les candidatures officielles à l’Union Européenne confèrent une importance croissante à ce que les habitants, les associations de locataires, de sans-abri, les comités des mal-logés des autres pays de l’Europe prennent aussi la parole et se mettent en réseau avec nous. Je ne parle pas d’une unification des mouvements mais d’une mise en réseau de ceux des différents pays.

Depuis 1998, lors du meeting HIC à Venise, nous avons décidé de soutenir les « stratégies populaires dans les villes », le renforcement de la prise de parole des habitants pour faire en sorte qu’ils existent, qu’ils puissent échanger des expériences, qu’ils deviennent des partenaires réels, et qu’ils ne revendiquent pas seulement leur existence, mais aussi des politiques. Les ministres, aujourd’hui et demain, se rencontrent et discutent de politiques publiques pour le logement. Dans leur communiqué rédigé durant le meeting de Kuopio en Finlande en 1999, ils ont promis d’échanger leurs expériences. En réalité, c’était « chacun pour soi ». Nous les habitants pensons qu’il s’avère de plus en plus important que les ministres de l’Union Européenne commencent à parler de politique de subsidiarité au niveau de l’Union. Ceci pour que, par exemple dans les villes, où sévit une crise du logement, des fonds européens interviennent avec des minimums garantis. Ceci afin que les pays et régions qui ne respectent pas ce droit soient de quelques façons contraints de le faire car il concrétise le droit à la vie de ces personnes. Nous devons parcourir ensemble cette route nécessaire parce que, comme Klaus et Gus l’ont souligné, la présence aujourd’hui des associations qui se battent contre la mondialisation néolibérale doit faire émerger un modèle tout à fait différent. En tant que HIC, nous avons discuté de la situation en Europe et de l’établissement d’une sorte de contre-pouvoir face au super-pouvoir du dollar. C’est une discussion importante, même s’il n’y a pas de vraies réponses. À l’intérieur de la globalisation, le modèle de l’Union Européenne est différent du NAFTA (marché commun promu par les USA, s’étendant du nord de l’Amérique jusqu’au Mexique). Mais pour faire en sorte que l’Union Européenne ne soit pas écrasée par les pouvoirs du dollar, nous pensons (c’est une chose à discuter entre nous - le débat est ouvert), qu’il faut vraiment que l’Union Européenne ne soit pas seulement fondée sur la monnaie, donc sur les critères de convergences jusqu’ici considérés comme les seuls critères pour adhérer à cette Union. Il doit aussi exister des critères de convergence sociaux. Pour introduire ce type de critères - notamment les droits aux logements, à la ville et à l’habitat - les pouvoirs publics et l’Union Européenne devraient les prennent en charge. Les habitants doivent prendre la parole. Cette année, c’est déjà la deuxième rencontre des habitants que nous organisons. La première à Berlin s’est tenue face au meeting officiel Urban 21, où les Nations Unies et des gouvernements comme celui de l’Allemagne, etc., discutaient d’un futur technocrate, optimiste, qui encore une fois hélas ne prenait pas en compte la présence des habitants. À Berlin, nous avons précisé nos stratégies pour que notre région commence à avoir un poids réel et devienne un modèle. Pour que l’Europe puisse faire face au modèle de la globalisation libérale, dominée par le dollar, l’empire unique qui règne maintenant. Pour ce faire il faut entrer dans le concret, renforcer notre rôle.

Rentrer dans le concret est notre tache spécifique, à nous habitants, locataires, sans-abri. Je veux donc souligner l’importance d’intervenir face aux ministres du logement, face à l’Union Européenne.

En même temps que nous sommes réunis ici se tient la réunion du Parlement Européen traitant de la Charte européenne des Droits Fondamentaux. Sa dernière version ne traite pas de la question du droit au logement. On parle en général d’un droit à l’aide au logement : les personnes auraient le droit de demander aux pouvoirs publics une assistance, mais c’est un droit de pétition, pas un droit reconnu. C’est un pas en arrière face à l’actuelle Charte Sociale européenne et, surtout, aux engagements légaux que tous les pays de l’Union Européenne ont déjà pris avec la signature de la Convention Internationale sur les Droits Sociaux, Économiques et Culturels. Car elle prévoit à l’article 11, le droit au logement. Que pouvons-nous faire ? Discuter ici, proposer aux ministres de se faire porte-parole d’une proposition précise de soutien au droit au logement dans la Charte et, en même temps, travailler, se mettre en réseaux, promouvoir ce droit pour faire en sorte que le sommet de Nice, au mois de décembre, à la fin de la présidence française de l’Union Européenne, le prenne.

Je ne suis pas trop optimiste sur la réussite de cette bataille, mais je le suis quant à la possibilité pour les habitants de se mettre en réseau, de prendre conscience pour eux-mêmes, de commencer à bâtir la solidarité transnationale. C’est pourquoi il faut organiser un suivi pour nous tous. Nous devons nous mettre en réseau, avoir des échéances, une plate-forme. Nous, les fantômes, devons devenir des cauchemars des pouvoirs publics qui n’ont pas envie de prendre en compte le droit des personnes. Jusqu’ici, nous sommes seulement des virgules, des estimations, une sensibilité, peut-être de la poésie. Évidemment, la vie c’est aussi de la poésie, mais nous essayerons de devenir des cauchemars, c’est-à-dire un réseau d’habitants qui puisse devenir un réel acteur politique.

Mais attention, la politique publique peut être demandée, peut être agie et peut être aussi proposée. Il y a différents niveaux. Je ne suis pas convaincu que, s’il n’y a pas de réponse des ministres, nous devions reculer Je suis par contre convaincu qu’alors, nous devrons aller dans leurs tanières, dans chaque pays, dans chaque région. Parce que c’est la tâche qui nous incombe : qu’ils prennent en compte le droit au logement par des politiques publiques. Je suis également convaincu que nous pouvons agir sur les politiques.

Justement hier, ici à Paris, certains fantômes se sont matérialisés dans un immeuble vacant, spéculatif, en réquisitionnant des logements. De bons débats ont eu lieu malgré la présence de la police. La proposition a été faite d’appliquer certaines lois existant en France. Mais existe-t-il des lois semblables dans d’autres pays européens ?. Après état des lieux, nous constatons qu’il y a des possibilités dans certaines régions, devant certains pouvoir, en ce qui concerne les questions d’ordre public. Alors, pourquoi ne pas proposer des lois ou des politiques, même au niveau européen, pour faire en sorte que les logements vacants soient habités ? Pour que les fantômes soient chassés de ces logements vides afin d’y installer des personnes réelles. Ce serait possible si nous avions la conviction et si l’ont mettait en place un réseau, une plate-forme, lançait des campagnes. Pour faire émerger la contradiction entre l’incroyable nombre des sans-abri, de mal-logés et l’incroyable nombre de logements vacants. Cette tâche, cette politique nous incombent dans chaque pays et au niveau de l’Union Européenne.

Nous parlons aussi d’une marchandise, le logement, qui n’est pas utilisé et aussi de l’importance de préserver l’environnement. On ne peut pas continuer à construire encore, alors qu’il y a des millions de logements vacants. Au nom de quoi, de qui ? faudrait-il continuer à sur-évaluer la valeur de l’immobilier ? D’une superpuissance de la spéculation foncière rentière ? Cette question ne se pose pas seulement à nous habitants, mais aussi aux pouvoirs publics et aux pouvoirs économiques. L’exemple du Japon est éclairant. La grande bulle financière des années passées était fondée, en grande partie, sur la sur-évaluation de l’immobilier : quand celle-ci a pris de l’ampleur, l’économie financière du Japon s’est dégonflée. L’Europe doit aussi faire attention aux conséquences possibles. Nous avons donc plusieurs arguments à discuter avec les pouvoirs publics. Il ne s’agit pas seulement de poésie sociale comme ils le pensent mais aussi de la base de la solidité de l’Union Européenne en tant qu’économie. Évidemment, notre argumentation principale sera le respect du droit, la cohésion sociale, mais attention, il existe aussi d’autres dimensions. C’est pourquoi une campagne est nécessaire sur les logements vacants et les sans-abri. Plusieurs arguments nous permettent soit de mobiliser les gens, les personnes, les associations, soit de trouver des alliances avec le mouvement plus général contre la globalisation et avec les syndicats de travailleurs. Mais je pense aussi a des alliances avec certaines villes, certaines mairies, certains pouvoirs locaux qui sont sensibles pour des raisons politiques, qui sont conscientes de la retombée négative de la mondialisation et de la globalisation sur des villes qui, sans ni moyens financiers ni politiques, ne peuvent rien.

Pourquoi ces puissances financières interviennent-elles à Milan plutôt qu’à Paris ou à Bruxelles ? Si l’on prend l’exemple de Bruxelles, que signifie le poids de l’Union Européenne ? Combien de gens ont été immolés sur l’autel de l’Union Européenne à cause de la spéculation dans cette ville ? Combien de ménages, de drames familiaux se sont passés là-bas ? On peut parler d’autres villes également. Combien de drames ont lieu actuellement dans les pays qui ont demandé l’adhésion à l’Union Européenne et, en même temps, supportent l’arrivée des capitaux étrangers qui interviennent très lourdement dans leurs centres historiques ? Par exemple, à Prague, il n’y a pas seulement le sommet qui se déroule actuellement, pas seulement 20 000 fonctionnaires, chefs d’États, qui débattent. Des capitaux lourds interviennent qui expulsent les gens du quartier central. Je pourrais également prendre l’exemple d’autres villes. Il faut réagir.

Je vais terminer par l’agenda. Il y a eu Venise, Berlin et maintenant Paris. Entre temps, tout un travail s’est réalisé, principalement ici à Paris. La Charte Européenne pour le Droit à Habiter et pour la Lutte contre l’Exclusion est un réseau des réseaux qui, pendant les années passées, a travaillé en solitaire, rassemblé différentes compétences (gestionnaires de logements sociaux, représentants d’ONG, représentants des pouvoirs locaux, jeunes, locataires, chercheurs) sur la question des sans-abri. Ils ont affirmés certains principes inscrits dans une déclaration commune. Les documents mis à disposition ici comprennent cette déclaration, ces racines, car notre réflexion ne naît pas de rien. L’agenda s’est développé les dernières années sur les créneaux "habitants". La semaine prochaine se teindra au Mexique une assemblée mondiale des habitants, au cours de laquelle les habitants de différentes régions de l’Amérique Latine, de l’Asie, de l’Afrique et de l’Europe, pourront échanger des expériences et avoir l’occasion de se mettre en réseau. Pourquoi faire ? Ce n’est pas une fin en soi mais il y a les échéances de la mondialisation : l’une d’entre elle est le sommet des Nations Unies, l’Assemblée Générale de l’ONU à New York, en juin 2001. Mais pour y faire quoi ? Très peu de personnes connaissent la Déclaration d’Istanbul sur l’Habitat. Un nombre incroyable de principes, de bonnes paroles, la promotion du partenariat entre différents sujets, etc. Cinq années plus tard, qu’est devenu réellement cet Agenda Habitat qui aurait dû contraindre ou indiquer un chemin pour les pouvoirs publics ? Il n’y a presque rien eu ! La vérification du respect de certains principes, sera fait à New-York. Nous sommes très préoccupés de ce qui va s’y jouer parce que la Banque Mondiale, qui elle ne fait pas de poésie, est en train de promouvoir assez lourdement des politiques sur les villes. « Sur les villes » car elle propose la "City Alliance", l’Alliance des villes avec les Nations-Unies et l’agence UNCHS-Habitat. Concrètement, cela signifie que la Banque Mondiale ne donnera de l’argent pour promouvoir les politiques urbaines que si les villes acceptent certains principes. Nous avons lu et analysé avec une grande inquiétude le document de la Banque mondiale sur ces politiques car ces propositions, en substance, proposent des villes technocratiques, des villes-marchés dans lesquelles les habitants sont des sous-produits considérés comme des consommateurs faisant partie du grand marché. Où se trouve le partenariat ? En réalité, il n’y a pas de place pour cela. Que pourrait-on faire pour faire émerger les habitants et leurs désirs de promouvoir les droits aux logement et à la ville ? Notre présence à New-York serait importante pour faire émerger ces fantômes. Il faudrait trouver des moyens percutants afin de manifester notre présence. Surtout, nous devrions bâtir notre réseau pour soutenir des politiques alternatives. Je ne suis pas convaincu que tous les pouvoirs locaux soient des vendus, mais qu’au contraire, nous avons la possibilité de trouver des alliances avec eux pour faire en sorte que face à la Banque Mondiale, donc face aux Nations Unies, la « City Alliance » soit l’une des politiques et non la seule. Pour cela, nous devons préciser notre politique pour le droit au logement, le droit à la ville.

New-York sera aussi l’occasion de vérifier l’état des lieux du réseau des habitants, dans lequel HIC veut jouer un rôle important. Nous devrons donc faire un état des lieux pour qu’après New York, la lutte contre la globalisation urbaine soit plus efficace.

 Klaus Teschner

À propos des stratégies, revenons aux discussions de Berlin. L’un des point était un examen pays par pays et la mise au point de stratégies à partir de lui. Ou de bien préparer nos propositions aux ministres. Nous en reparlerons au cours de cette rencontre et devons nous préparer aux évènements à venir, comme New-York, les nouvelles stratégies de la Banque Mondiale (City Alliance), etc. Nous pourrons aussi parler d’autres expériences.

 Katherin Coit - Association Internationale de Techniciens, Experts et Chercheurs (AITEC), France

Cesare peut-il préciser ses critiques des documents de la Banque Mondiale et des "city alliances" ? Existe-t-il un document ?

 Cesare Ottolini

Un document a été publié en octobre 1999 par la Banque Mondiale. Il propose des interventions, c’est-à-dire des financements de la politique urbaine. Il ne parle pas d’un réel partenariat mais seulement d’un rapport avec les pouvoirs locaux. Han Van Putten a étudié plus en profondeur ce sujet.

 Han Van Putten - Habitat International Coalition (HIC), Hollande

La Banque Mondiale a légèrement changé d’attitude ces dernières années depuis la nomination de son nouveau président, qui est plus ouvert aux critiques et au dialogue. L’un des principaux objectifs de cette « city alliances » est l’augmentation de la participation des actionnaires aux décisions.

 Paul Trigalet - Solidarités Nouvelles, Belgique

Cesare a parlé des alliances nécessaires. On sait que le pouvoir a toujours tendance à diviser. On a parlé du fait qu’il y a des absents aujourd’hui qui sont à Prague dans le combat contre la mondialisation. Ne devrions-nous n’aurions pas, dans l’intérêt dans notre combat, tisser des liens avec les associations, les ONG qui se battent contre la mondialisation ? On sait que, par exemple, l’Europe est toujours réticente à mettre le logement dans la compétence européenne et qu’ainsi elle nous divise. N’avons-nous pas un combat commun avec tous ceux qui luttent contre la globalisation ? Cesare a mentionné les répercussions de l’installation de l’Europe à Bruxelles qui manifestement a eu un effet néfaste sur le droit au logement et les problèmes de logement dans cette ville. Cela montre bien qu’il existe un lien entre les globalisations, qu’elles soient européennes ou mondiales. Nous aurions intérêt à réfléchir à des stratégies qui relient notre combat et celui de tous ceux qui se dressent contre la mondialisation.

 Jean-Yves Cottin - Comité des Sans-Logis de Paris, France

Je voudrais rebondir sur ce qui vient d’être dit en regrettant son manque de clarté. On parle de mouvements sociaux, de nouveaux mouvements sociaux, de tout sauf de liens profonds avec la classe ouvrière. Cela commence à me poser un problème et je voudrais savoir comment nous, les militants de l’an 2000, nous situons par rapport à l’histoire du mouvement ouvrier. Cela me paraît quelque chose de fondamental. On n’est pas des martiens ! On ne vit pas sur une autre planète mais avec une exploitation des travailleurs aux crises conjuguées du chômage et du logement. Il est important de ressouder, en France et au niveau européen, un encrage profond avec la classe ouvrière et avec les organisations des travailleurs. Je pense en particulier aux syndicats et aux partis politiques.

Deuxièmement, j’aurais aimé que l’on réfléchisse ensemble, en profitant de ces deux jours, à développer des solidarités, parce que l’on voit quand même que nous ne sommes pas très nombreux au niveau européen. Nous ne sommes pas très nombreux et cela ne prouve pas que nous sommes une grande force. Ce n’est pas ça qui va peser suffisamment dans la balance pour que les politiques du logement changent au niveau européen. Il faut donc réfléchir à des solidarités. A Nice, quelque chose d’important va se passer en décembre, une manifestation de plus de 50 000 personnes grâce notamment à la mobilisation de la Confédération Européenne des Syndicats. Il faut que nous soyons présents, pour qu’à Nice, il y ait un pôle logement se dégage. Peut-être en organisant également une action dans le style de celle d’hier. Cela pourrait avoir lieu à Nice. C’est une ville qui s’est permise de faire arrêter les sans-abri par la police et de les lâcher à trente kilomètres de la ville, les pieds nus et en leur disant « démerdez-vous maintenant pour rentrer et de préférence ailleurs qu’à Nice ». Nice a été également la première ville à suivre à l’époque, il y a trois, quatre ans , les arrêtés anti-mendicité. Ils ne se sont pas gêné d’en adopter un, des plus répressif de surcroît. Il faut développer aussi des solidarités, je pense en particulier lorsque les camarades canadiens du Comité des Chômeurs de Montréal ont été réprimés violemment par la police et qu’ils ont été emprisonnés à la suite de leur dernière action, il y a maintenant trois ans, nous avons manifesté devant l’Ambassade du Canada. Ce sont des choses à développer. Quand il y a des camarades qui organisent quelque part une action, il faudrait que les autres mouvements pour le logement au niveau de l’Europe soient prévenus et manifestent d’une façon ou d’une autre (bien entendu on ne va pas demander de faire chaque fois 500 km en bus ou en trains) mais il y a d’autres solidarités à développer. Il y a les représentations diplomatiques, il y a les campagnes de fax, etc. Il faut que les dirigeants sentent qu’il y a quelque chose qui se construit et que l’on n’hésite pas à se soutenir mutuellement, en particulier dans le cadre de répressions toujours possibles.

 Vincenzo Simoni - Unione Inquilini, Italie

Je suis le secrétaire général de l’union des locataires d’Italie, l’un des trois syndicats de locataires les plus important. Je propose un amendement à la Charte pour les Droits Fondamentaux qui est en discussion au Parlement Européen, concernant le droit au logement. Pour arriver à la réunion des ministres avec une proposition concrète il faut la définir avant la fin de la matinée. C’est un amendement suppressif et alternatif à l’article 33. La proposition est l’ajout d’un nouvel alinéa. « l’Union reconnaît et respecte le droit de toutes les personnes au logement et promeut les conditions pour le garantir et le rendre effectif ». Sur l’importance de cet article, il faut souligner que le texte qui est en discussion au niveau européen ne prévoit pas le droit au logement, mais il y a une subordination du respect du droit au logement aux lois nationales. Ce n’est pas un droit au logement, c’est plutôt un droit à l’aide au logement. Avec ce texte, nous risquons de ne pas pouvoir aller en justice, par exemple devant la Cour européenne de Strasbourg. En pratique, toute une série de conditions prévues nous empêcherons d’aller en justice au niveau européen. « Pratique » vient du mot grec « Praxis ». Tout cela est très dangereux car il y a le risque d’un arriéré. Il y a une liaison à faire avec un autre amendement à l’article 1. Il faut donc trouver une formule technique afin d’établir ce lien. Dans l’article original, on parlait seulement de la dignité humaine à respecter ou de l’inviolabilité de la dignité humaine. Grâce à notre amendement, le droit au logement ferait partie des droits inviolables de la dignité humaine. Ce n’est pas de la poésie mais de la jurisprudence. Cela pourrait donner la force d’aller en justice car l’on pourra se référer à des articles de lois pour déposer des plaintes. La conséquence pratique pourrait être qu’une personne ou une association pourrait aller en justice au niveau européen contre un maire, un propriétaire, un gouvernement qui refuserait un logement aux personnes qui sont expulsées. Le problème est la décentralisation des tribunaux de justice au niveau européen. Une solution serait la création de sections juridiques européennes détachées auprès des tribunaux nationaux. Sur la question de Nice, il faudrait vérifier l’agenda officiel et celui des autres organisations (de travailleurs, des mouvements sociaux, etc.). Afin de s’inscrire dans cette mobilisation importante, nous pouvons mobiliser plus de 1000 personnes d’Italie grâce à notre proximité géographique afin d’avoir une présence plus significative et visible concernant le droit au logement dans la manifestation d’ensemble

 Klaus Teschner

Cette proposition devrait être reprise dans l’atelier consacré à celles à présenter à la réunion avec les ministres.