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Services publics pour l’Europe et droits fondamentaux de la personne - Jean Claude Boual - 1997

Publié par , le 13 mars 2007.





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Jusqu’au Traité sur l’Union, la construction européenne était supposée ne pas affecter la souveraineté des États membres. Depuis, elle affecte l’action publique sans s’y substituer, dans une situation juridique ambiguë.

Les interventions publiques économiques nationales apparaissent soit en creux (quand leur existence est postulée - par exemple quand un contrôle des politiques publiques est prévu) soit comme exceptions (limitations à la concurrence au nom des « exigences supérieures d’intérêt général »).

En pratique donc, le droit communautaire ignore les droits fondamentaux, conditionne leur réalité au jeu du marché. Le droit communautaire de la concurrence s’applique à toute entité quel que soit son statut, son mode de financement et sa mission, dès lors qu’elle exerce une activité économique. Quant au droit des États membres, la majorité des constitutions inclu ces droits fondamentaux sans en garantir l’exercice.

Or un conflit de droits apparaît quand ces droits fondamentaux sont concrètement remis en cause par d’autres principes de même niveau juridique comme le droit de grève ou la privatisation de services publics (l’audio-visuel). Alors, depuis le début des années 80, les juridictions constitutionnelles justifient l’intervention publique limitant l’emprise du droit de la concurrence ou du droit de grève par la protection de droits fondamentaux de la personne.
De manière encore limitée, la Cour de justice européenne les reconnaît comme principes généraux du droit communautaire (article F du Traité). Mais ils ne constituent pas une justification de l’action des États membres. D’autre part, leur définition reste du seul ressort de la Cour de justice, à l’occasion d’une contestation de la légalité d’un acte communautaire ou d’une demande d’interprétation.

Ce sont essentiellement le droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, la liberté de pensée, de conscience et de religion, d’expression, d’opinion, de recevoir et de communiquer informations et idées, de réu-nion pacifique, d’association de fonder des syndicats et de s’y affilier pour défendre ses intérêts (articles 8,9,10 et 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme).

Le projet de traité d’Amsterdam comporte cette modification à l’article F du Traité : « L’Union est fondée sur les principes de la liberté, de la démocratie, du respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l’état de droit, principes qui sont communs aux États membres ».

Quant au projet de charte des Citoyennes et Citoyens européens du Forum permanent de la société civile (soutenu par le Comité européen de liaison sur les services d’intérêt général), il propose (titre III § D) : « Des services d’intérêt général » ; l’Union est garante de la solidarité et de la cohésion sociales. Elle établit à cette fin des règles publiques et sociales sur le marché intérieur et des politiques communes pour le développement. L’accès des citoyens européens aux services d’intérêt général au niveau des États membres et de l’Union, contribuant aux objectifs d’égalité, de solidarité et de cohésion sociale, fait partie intégrante de la reconnaissance et de la garantie d’exercice des droits fondamentaux de la personne humaine. Chaque citoyen européen a droit notamment à un environnement sain, à une justice égale pour tous, à un enseignement, à des soins de santé et des services sociaux de qualité ».

Les droits fondamentaux garantis devraient s’organiser en trois groupes (à discuter) :
 droits aux libertés (d’aller et venir, d’opinion, de pensée et de conscience, d’association, de réunion…),
 droits à l’intégrité de la personne (à la vie, sécurité, santé, protection de l’environnement, sûreté…),
 droits au développement et à l’épanouissement de la personne en société (dignité, instruction, protection sociale…).

La liaison entre la garantie de ces droits, l’organisation et le fonctionnement du marché commun est également à débattre. Mais surtout « la liberté a besoin, pour être effective, que l’État organise les grands services publics », car ils constituent des conditions d’effectivité des droits fondamentaux. Sauf pour les activités relevant d’une compétence communautaire exclusive ou concurrente (subsidiarité) les dispositifs et procédés d’organisation des droits fondamentaux relèvent des États membres, ce qui préserve la diversité nationale et locale des services publics.