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Soldes à Londres : grandes promotions sur le logement social - Royaume-Uni - Fabien Vaujany

Publié par , le 17 octobre 2007.





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En 2000, le gouvernement travailliste s’est engagé à ce qu’en 2010 l’ensemble des logements sociaux du pays réponde à certaines normes de décence et de salubrité. Depuis, on constate, de la part des municipalités londoniennes – les boroughs, un recours croissant à des formes plus ou moins abouties de privatisation de leur parc social.

L’offre en logement social en Angleterre se divise en deux. Une partie du parc relève de la multitude de Housing Associations, vieilles structures privées aux tailles et aux pratiques très différentes. Le reste est géré en propre par les municipalités. Depuis l’annonce de l’objectif irréaliste des Decent Homes pour 2010, celles-ci ne cessent de se poser une question essentielle : où trouver l’argent nécessaire à un tel investissement ?

Dès le départ, l’argumentaire des collectivités locales est simple : ces moyens n’existent pas dans le secteur public. Trois solutions sont alors progressivement imaginées : PFI, ALMO, Stock Transfer. Ces options aux noms obscurs, malgré leurs différences, représentent toutes un pas de plus vers la privatisation du logement social.

L’Initiative Financière Privée (Private Finance Initiative) est une méthode qui consiste à passer un contrat avec une entreprise privée qui va emprunter et se charger des travaux nécessaires à la réfection des logements. Elle peut s’accompagner d’une concession de la gestion du parc locatif sur de longues périodes. Afin de couvrir le remboursement du prêt ainsi que les éventuels frais de gestion de l’entreprise, la collectivité lui verse une somme annuelle. L’équation est alors assez simple : l’addition de taux d’intérêts élevés, la volonté, du côté de l’entreprise de dégager un profit et la durée de certaines de ces PFI font que cette solution revient très cher à la collectivité. Engager elle-même les travaux serait moins onéreux. En effet, les collectivités peuvent emprunter à des taux avantageux ; la possibilité virtuellement nulle de faire banqueroute limite fortement le risque encouru par la banque lors du prêt. Toutefois, par souci de limiter les dépenses publiques, cette démarche leur est interdite. D’après les directives gouvernementales, l’idéal est d’externaliser au maximum et de faire disparaître du budget public tout ce qui a trait au logement. Les boroughs se plient à ces exigences et s’orientent plus encore vers les deux autres solutions.

L’ALMO - Arm Length Management Organisation- désigne une structure mixte à qui la gestion des logements est déléguée par contrat. Théoriquement dirigée par un conseil regroupant des représentants de la collectivité, des membres indépendants et des locataires, ces derniers sont, dans les faits, régulièrement marginalisés. L’ALMO est financée par des dotations spécifiques de l’Etat. En d’autres termes, l’argent n’est versé que si une ALMO est mise en place. L’incitation est claire.

La solution du transfert du parc (stock transfer) est la plus aboutie en terme de privatisation. Le borough perd tout simplement la propriété de ses logements en cédant une partie de son parc à une Housing Association. A Londres, une quinzaine de celles-ci dominent le secteur et suivent une logique de promoteurs privés. Le nouveau propriétaire, libre de trouver les financements où il le souhaite, se charge alors d’améliorer les habitations. Cet argent, il le trouve parfois auprès de la collectivité qui en vient à payer pour donner ses logements ! Il peut également l’obtenir par la hausse des loyers et la restriction des dépenses. La qualité de service pour les locataires s’en trouve, bien évidemment, diminuée. Reste, pour les collectivités, une autre possibilité, assez fréquemment utilisée : la vente d’une partie des terrains à des promoteurs privés, qui entraîne la disparition pure et simple des logements sociaux.

PFI, ALMO et Stock Transfer ne sont pourtant pas les trois seules solutions possibles comme souhaitent le faire croire les autorités locales : elles relèvent uniquement d’un choix politique. Face à cette marche vers la privatisation et au coût exorbitant que cela représente, la campagne en faveur de la « Quatrième option » veut prendre de l’ampleur. Son objectif est de fédérer les locataires, de lutter contre le défaitisme ambiant et de chercher des soutiens politiques. Certains élus locaux et nationaux, même dans les rangs de la majorité, soutiennent déjà cette option toute simple : investissons directement dans le logement social des boroughs.

Fabien Vaujany, 4 aout 2005