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Polycentrisme versus hypercentralité

Publié par , le 9 juin 2008.





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Le 23 mai 2008, à l’Aitec.

Débat introduit par Patrick Braouzec, député de la deuxième circonscription de la Seine-Saint-Denis et conseiller municipal délégué de Saint-Denis. Président de la communauté d’agglomération Plaine Commune.

La région Ile de France est confrontée à la montée des inégalités sociales et territoriales ainsi qu’à l’hypercentralité de Paris. La réforme institutionnelle est inévitable. Le découpage institutionnel et le recoupement de compétences ne sont pas adaptés à la mise en œuvre de projets de rééquilibrage, en matière de transports, d’emploi, de logement... Sur le plan politique, Patrick Braouzec défend le principe d’une multipolarité.

Questions soulevées par Patrick Braouzec, qui guident la réflexion et orientent les propositions :
 Comment enrayer la montée des inégalités sociales et territoriales de la région Ile de France ? Le développement économique n’étant évidemment pas significatif de développement social
 Comment toucher l’habitant-citoyen sur une question d’ordre institutionnel difficilement appropriable ? Est-ce seulement une question institutionnelle ? Quelle est l’articulation entre les aspects institutionnel, politique et de développement ? L’enjeu étant d’enrayer la montée des processus ségrégatifs, de faire en sorte que le marché ne fasse pas la loi et que les pouvoirs publics reprennent les rênes.

Porté par Patrick Braouzec, le scénario en pétales, également baptisé « scénario de la marguerite », vise à développer, autour du centre parisien, 6 à 8 grandes intercommunalités très intégrées en matière d’urbanisme.

Il est important que chacun se sente dans une centralité et, non pas, dans une marginalité. On voit se dessiner des pôles structurants allant jusqu’aux villes nouvelles : Défense- Boulogne-Versailles ; Montreuil-Fontenay ; Ivry-Vitry-Orly-Créteil ; au sud vallée de la Bièvre ; Plaine Commune au Nord.

Chacun de ces pétales serait porté par un pôle économique et serait susceptible de réaliser une redistribution équitable en son sein. Ils englobent également les questions environnementales et foncières. Il s’agit également de développer des politiques publiques promouvant des alternatives économiques – qui ne soient pas seulement sous tutelle de l’économie de marché. Pour cela, les grandes intercommunalités peuvent établir une péréquation fiscale – notamment de la taxe professionnelle – qui pourrait être utile à toutes les communes partie prenantes, comme cela est le cas, selon lui, pour Plaine commune. Ainsi, « Plaine commune est un exemple qui pourrait servir de matrice ». Pour Patrick Braouzec, le « grand Paris » est un concept du passé, hyper centralisateur car ce n’est que l’extension de la capitale aux communes avoisinantes, créant toujours plus de valeurs au centre et donc de marginalités aux franges.

Chaque rencontre – locale, régionale…- doit constituer une opportunité pour aborder la question. Se saisir de chaque occasion pour interpeller les citoyens sur le Grand Paris. Ce débat est très peu lisible pour le citoyen alors que le scénario retenu – réforme institutionnelle/vision à moyen et long terme de la région/promotion d’un modèle de développement – aura des conséquences majeures sur son quotidien.

Quelques points saillants du débat :

1. Paris, hypercentre et centrifuge

Quel développement de Paris-Capitale pour éviter l’hypercentrisme et ses effets néfastes sur l’équilibre économique et social du territoire ?

2. Paris, ville monde, ville globale

Quel développement durable de la mégapole dans le réseau des villes-monde ; au service du territoire, des personnes et non du marché et des profits ?

3. Organisation institutionnelle et échelles d’aménagement. La place de l’intercommunalité

Comment enrayer l’aggravation des inégalités sociales et territoriales en région Ile de France ? L’organisation institutionnelle et les échelles d’aménagement comme levier possible. L’intercommunalité comme échelon intéressant.

4. GP, polycentrique

Comment le scénario de la marguerite peut-il garantir un développement cohérent et équilibré du territoire ? Peut-il ou doit-il éviter la spécialisation des pétales (pôles) ? Peut-il ou doit-il éviter le symptôme du pistil hypertrophié ?

5. GP des citoyens
Comment faire du GP une question saisissable par les citoyens ?

1. Paris, hypercentre et centrifuge

Quel développement de Paris-Capitale pour éviter l’hypercentrisme et ses effets néfastes sur l’équilibre économique et social du territoire ?

Dès lors que l’on parle de Grand Paris, on évoque la centralité ; une centralité négative qui a toujours rejeté ce qu’elle considérait comme improductif, habitants et activités, hors de ses murs. Une hyper centralité à l’échelle régionale, une hyper centralité à l’échelle nationale…Dès lors, où va s’arrêter ce Grand Paris ?

L’hyper centralité parisienne renvoie à la densité urbaine vs l’étalement urbain.
Dans les schémas de cohérence territoriale, penser ¼ logement, ¼ de bureau, ¼ d’espaces publics et ¼ d’espaces verts a des conséquences : on monte en hauteur, on tente de prévenir l’étalement urbain.
Les discussions autour du Grand Paris doivent nous permettre de reposer ces enjeux : partir des territoires, ce qui fonctionne et ne fonctionne pas.

2. Paris, ville monde, ville globale

Quel développement durable de la mégapole dans réseau des villes-monde ; au service du territoire, des personnes et non du marché et des profits ?

Paris, l’une des 27 mégapoles du monde, une ville globale qui se situe dans le peloton de tête de commandement de la globalisation. La première place européenne financière – devant Londres- un centre de pouvoir(s). La mondialisation, c’est la Bourse, le pouvoir financier. Dès lors que le système monde change, que de nouvelles mégapoles émergent, marquer des points sur les autres villes compétitives semble être le baromètre des acteurs politiques. C’est la question « Comment faire pour maintenir cette place, pour que la mondialisation financière continue de trouver Paris sexy ? » qui prime sur la lutte contre les inégalités, long chemin. On peut profiter de ce débat sur le Grand Paris pour poser autrement la question des villes globales et interroger cet affolement « comment Paris peut-elle « redevenir » première place financière ? Le développement économique n’est pas un objectif en soir, il est nécessairement au service du développement durable, du développement de la personne.

C’est aussi à cette échelle que se situe le débat : quelles propositions pour l’aménagement de Paris mégapole ? Comment poser la question des villes globales ? Le développement économique n’est pas un objet en soi, on le reconnaît : il est au service du développement durable, du développement de la personne. Comment faire en sorte que le marché ne fasse pas la loi et que les pouvoirs publics reprennent les rênes ?

Une autre manière de penser et de faire la globalisation est possible.
Elle suppose de penser la lutte contre les inégalités sociales et territoriales comme le fondement et l’orientation des politiques publiques et d’aménagement des territoires.
Elle suppose également de penser différemment la relation entre villes centre et villes périphériques afin que ces dernières ne se fassent pas manger tout cru .

3. Organisation institutionnelle et échelles d’aménagement

Comment enrayer l’aggravation des inégalités sociales et territoriales en région Ile de France ? L’organisation institutionnelle et les échelles d’aménagement comme levier possible. L’intercommunalité comme échelon intéressant.

Les précédents schémas directeurs avaient déjà pour objectif de diminuer les inégalités : elles n’ont fait que s’accentuer ! On est confronté au rejet -toujours plus loin- des indésirables.
Le traitement des inégalités renvoie aux échelles d’aménagement (quartier, commune, intercommunalités) et aux champs d’intervention. Une politique des transports favorisant la mobilité peut enrayer des effets ghettoïsants. Les dépenses transports/logement constituent un élément déterminant dans les choix de résidentialisation. Penser l’ensemble logement-transport n’a pas de sens au niveau local et demeure non soluble au niveau de l’intercommunalité.

Montrer ce qui ne fonctionne pas (politiques du logement par exemple) et qui devrait fonctionner autrement : la lecture des compétences et de l’articulation des échelons institutionnels est, à ce titre, une clé de compréhension.

Nous pouvons profiter de ce débat sur le Grand Paris pour expliciter le rôle, les responsabilités, les moyens des communes/départements/régions et intercommunalités. La manière dont certaines compétences se recoupent et se télescopent, ne sont pas distribuées de telle sorte que l’efficacité soit optimale…

L’intercommunalité : une clé de compréhension

Un bon échelon de décision et de mise en œuvre de politiques publiques : quelle régulation démocratiques créer à ce type d’échelle ?
La création d’intercommunalité brise une histoire administrative et politique de 200 ans. La question des élections directes dans les intercommunalités doit être reposée – difficilement audible. Pourtant, c’est aussi l’intercommunalité qui peut permettre de sortir des étroitesses locales, d’identifier des projets de territoires, de faire émerger des hypothèses de développement commun.
Bien entendu, la question du regroupement est essentielle : Avec qui Nanterre peut-il créer une intercommunalité ? Puteaux ? La base est volontariste ; le risque : de voir se réunir les territoires riches. L’enjeu étant de montrer que l’égoïsme mène à la catastrophe. On retrouve ici la notion de projet politique et de personnalités politiques.
Ce type de projet serait il porté par le citoyen ? On n’échappera pas à du top down : quand l’institution se pose, alors il y a mobilisation.
Evidemment, un facteur incitatif = la taxe professionnelle

1998 : la ville de St Denis voit qu’une dynamique économique s’enclenche, que le territoire Nord parisien va décoller : rendez vous prise avec les villes voisines, calcul fait à long terme (quel devenir pour les friches ? comment rendre attractifs les territoires plus reculés ? comment profiter collectivement de la richesse ainsi créée ?
Grâce à l’intercommunalité, l’investissement a été multiplié par 3 ou 4. En partageant des projets, on ouvre des horizons. L’avenir n’est pas seulement celui de la commune, c’est celui d’un réseau (exemple des 22 médiathèques reliées entre elles). Ex : réduction de 50% des inégalités à Plaine Commune.

4. GP, polycentrique

Comment le scénario de la marguerite peut-il garantir un développement cohérent et équilibré du territoire ? Peut-il ou doit-il éviter la spécialisation des pétales (pôles) ? Peut-il ou doit-il éviter le symptôme du pistil hypertrophié ?

Comment la population des périphéries même avec de nouvelles centralités, se construit-elle avec une idée de Paris au sens large du terme ? Autrement dit, comment les différents centres (le modèle de la marguerite) se développent-ils en formant un tout (et non pas une somme) ?

Les défenseurs de l’idée du polycentrisme sont peu nombreux. Pourtant, il est important de rappeler que chacun doit pouvoir se sentir dans une centralité et non dans une marginalité par rapport à un hyper centre.
En partant des territoires, de la qualité de leurs équipements, leurs logements, leurs espaces publics.

Relevons le risque de voir d’un côté des territoires se spécialiser, d’un autre rester une centralité parisienne forte continuer de s’affirmer (avec le scénario de la marguerite : on signifie toujours qu’il y a un pistil : Paris. La pensée urbaine sur « paris et sa banlieue » n’est pas suffisamment solide).
Il a du sens si on propose une compétence métropolitaine avec des rééquilibrages à opérer et une gestion assurée par les territoires : éviter le pistil hypertrophié.


5. Le Grand Paris des citoyens

Comment faire du GP une question saisissable par les citoyens ?

Reconnaissons que le travail réalisé par la région sur le SDRIF a été remarquable en terme de diffusion de l’information, de concertation.
Dans les 6 mois qui viennent, le débat autour du Grand Paris va prendre de l’ampleur :
Cf les "Assises métropolitaines " organisées par la Conférence Métropolitaine le 25 juin à St Denis.
 Continuer de travailler sur le décryptage des enjeux pour le citoyen.

 Prendre le temps dans chaque ville d’organiser des rencontres locales : tout débat doit permettre d’aborder la question du Grand paris d’une manière ou d’une autre. Se saisir de chaque occasion pour interpeller les citoyens sur le Grand Paris.

 Travailler à l’échelle ville, à l’échelle trottoir, ne pas monter trop haut le débat.

 Sur l’organisation administrative et des niveaux de gouvernance, les propositions pourraient être travaillées par les regroupements de maires, de régions… (Les associations type « Association des maires de France », « associations des régions de France… »…)

 Poursuivre l’audition d’acteurs du devenir du Grand Paris : les équipes d’architectes, les élus,

 Un recueil d’entretiens avec des représentants d’associations intermédiaires, de syndicats, d’associations locales, éventuellement d’un échantillon de citoyens sur : a) la compréhension des enjeux b) le positionnement par rapport aux échelles de gouvernance, aux propositions thématiques (logement, transport…) réalisé par des étudiants.

 En termes de démocratie, ce pourrait être un espace de déploiement des panels de citoyens

ANNEXE : la consultation internationale

Christian Blanc, nouveau secrétaire d’Etat chargé du développement de la région capitale, auprès de Jean-Louis Borloo fait la distinction entre "le Grand Paris" et "La région capitale". Il renvoie la question de la gouvernance à une étape ultérieure et reprend l’idée qu’il faut avoir une vision à 30 ou 40 ans de la région capitale.
10 équipes d’architecture travaillent sur ce dossier avec une projection expérimentale sur la tranche sud et sur la tranche nord (porte de la chapelle à Poissy)

Des trente-huit architectes qui ont répondu à la consultation internationale de recherche et développement pour "Le grand pari de l’agglomération parisienne", dix d’entre eux ont été sélectionnés :

 Christian de Portzamparc (France)
 Jean Nouvel (France)
 Yves Lion (France)
 Roland Castro (France)
 Antoine Grumbach (France)
 Djamel Klouche (France)
 Richard Rogers (Royaume-Uni)
 MVRDV (Pays-Bas)
 Finn Geipel (Allemagne/France)
 Bernardo Secchi (Italie)

Septembre 2007 : le président de la République Nicolas Sarkozy avait exprimé le souhait "qu’un nouveau projet d’aménagement global du Grand Paris" puisse faire l’objet d’une consultation internationale et mobiliser les compétences professionnelles d’une dizaine d’agences d’architecture et d’urbanisme. Plus qu’un concours d’idées ou un marché de définition, cette consultation a pour but de "produire un ensemble de réflexions et d’orientations stratégiques d’aménagement de l’espace à l’échelle de l’agglomération parisienne". Au-delà de Paris, il s’agit également de réfléchir à "La métropole du XXIe siècle de l’après-Kyoto".