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Coalition européenne d’action pour le droit au logement et à la ville : compte-rendu de l’Assemblée de Cluj

Publié par AITEC, le 15 mai 2023.

Droit au logement et droit à la villeMal logementLogement socialFinanciarisation du logement



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L’assemblée générale de la coalition européenne pour le droit au logement et à la ville s’est tenue à Cluj, en Roumanie, du 27 avril au 2 mai. Une cinquantaine d’activistes de mouvements de défense du droit au logement et à la ville étaient venus de toute l’Europe. Une diversité d’organisations, caractéristique de la coalition qui regroupe aussi bien des mouvements de base comme les syndicats de locataires ou la Plateforme des personnes affectées par les hypothèque ou encore HALEM – association de défense des habitant·e·s de logements légers et mobiles, mais aussi des associations de défense des habitant·e·s de bidonvilles, des organisations de sans -abris, de lutte contre les expulsions ou encore des ONG plus tournées vers le plaidoyer pour le droit au logement et à la ville.

  • Voir liste complète des organisations ici

Les enjeux de cette assemblée étaient de revenir sur les actions entreprises depuis l’assemblée d’Athènes, en novembre 2022 et de faire le point sur les priorités de la coalition en termes de plaidoyer, d’actions et d’alliances. Il s’agissait aussi de consolider l’action de la coalition à travers les groupes de travail : recherche, journée européenne d’action pour le droit au logement et à la ville, lutte contre les expulsions, etc.
L’Aitec et le DAL participaient avec le mandat de pouvoir réaffirmer les valeurs et les priorités de la Coalition afin de pouvoir proposer un plan d’action qui inclue aussi bien la participation commune au MIPIM que les élections européennes. Il s’agissait aussi de proposer quel a prochaine réunion, à l’automne se tienne à Paris, une occasion de célébrer les 10 ans de la coalition, de renforcer la solidarité internationale vis-à-vis des mouvements français dans le cadre de la loi Kasbarian et de la préparation du MIPIM. Enfin, dans un contexte pour le moins incertain pour la reconduction des financements de la FPH, il s’agit aussi de pouvoir inviter la FPH à observer la richesse du travail de la coalition pour le soutenir.

  • Voir le détail du programme ici

La situation des mouvements accueillant la rencontre à Cluj

L’assemblée a été accueillie dans de très bonnes conditions à la Tranzit House, une ancienne synagogue du centre-ville mise à disposition des projets d’intérêt collectifs par la communauté juive. L’association Social Housing Now ! constituée de chercheurs et d’avocats défendant l’accès au logement et les droits des locataires mais surtout de la communauté rrom contre les expulsions avaient organisé la rencontre avec la participation de militants autonomes de la Coopérativa, un centre social et agricole loué par un collectif dans le centre de Cluj et le collectif ACASA, un collectif autonome qui s’est uni pour acheter une maison et en faire un centre social auto-géré.
Le mouvement Social Housing Now ! s’est constitué après l’expulsion en 2016 de 300 personnes de la communauté Rrom d’un terrain qu’ils occupaient. Il conduit des actions d’analyse politique, accompagnent les familles expulsées devant la justice et conduit des actions de plaidoyer pour le logement social.
Le comité roumain d’organisation avait également organisé plusieurs conférences publiques : une conférence sur la gentrification dans les villes européennes, une conférence de présentation d’un guide autour de la question de l’éthique des journalistes, des chercheurs et artistes dans le cas des expulsions et enfin, une projection – débat du film ’Dislocations - Eviction routes to Cantonului street (1996-2016’) suivi d’un débat sur la lutte antiraciste pour le droit au logement, en présence d’activistes de la communauté rrom qui ont témoigné de leurs parcours et de l’impact des expulsions sur les personnes et leur communauté. Cette dernière session a permis d’aborder frontalement la question du racisme en lien avec des personnes affectées et cela a été un moment très fort politiquement et symboliquement.
L’action qui s’est tenue le 1er mai, visait à un rassemblement sur une place centrale de CLUJ puis à un pique-nique dans un parc. Cette action a réuni peu de monde, mais a permis d’aborder dans l’espace public la question du logement, dans un pays qui n’a pas coutume de manifester pour le 1er mai et où la question de l’anticapitalisme est encore fortement liée dans les esprits aux traumatismes du régime de Ceausescu.

L’action s’est globalement bien déroulée, avec une présence policière. Des prises de parole ont eu lieu dans l’espace public et la présence d’organisations européennes a constitué un fort soutien pour les organisations roumaines dont la capacité de mobilisation était très limitée et plus encore pendant cette journée de vacances scolaires ensoleillée.
Il faut souligner que cette action s’inscrivait dans une perspective de hausse importante des loyers et des prix de l’énergie en Roumanie et à Cluj en particulier, dont le maire conservateur et proche de l’extrême-droite, mène des politiques destinées à attirer les investisseurs privés et le tourisme et où comme dans l’ensemble des pays post-socialistes les propriétaires occupants représente une part importante des ménages, après la vente massive du parc social dans les années 90. Le marché locatif est marqué par une grande informalité (80% des locations sont sans contrat) et aucune loi ne protège les locataires.
Les camarades roumains ont souligné qu’il y a eu un vent de mobilisation important contre la corruption en 2016 avec des nombreuses personnes dans les rues mais qui a bénéficié politiquement à la droite après la dénonciation de la corruption du parti social-démocrate. La gauche roumaine se sent muette.

Les principaux éléments de l’assemblée

  • La journée européenne d’action pour le droit au logement et à la ville est un succès de plus en plus grand dans les villes qui la portent. Des actions diverses, sous une bannière commune. Au Portugal, elle a été marquée par une mobilisation exceptionnelle (40 000 personnes dans 7 villes). L’ensemble des organisations présentes ont toutefois souligné la difficulté de rallier les syndicats et les mouvements écologistes à cette journée d’action et la tendance dans de nombreuses villes à la récupération du mouvement par des partis politiques. La journée d’action européenne permet de donner une belle visibilité au mouvement et de mobiliser plus de monde. Il a été proposé de travailler à un appel européen commun qui permette de rendre plus visible la dimension européenne du mouvement et permette à la fois de s’entendre sur les principes communs d’action pour l’année prochaine, notamment dans la perspective des élections européennes ;
  • Il a été décidé de travailler à un plaidoyer européen autonome de la coalition pour les élections. Les groupes de travail et la prochaine rencontre de la coalition doivent permettre d’affiner ces demandes communes et d’identifier les aspects européens de la crise du logement mais aussi les compétences-clés (le marché unique qui limite les investissements de l’Etat dans le logement social et tend à attirer les investissements de capitaux internationaux ; la question de la préservation de l’environnement et notamment de la rénovation thermique ; les impacts des politiques du logement d’abord)
  • Le groupe recherche poursuit son travail sur la hausse des prix de l’énergie et l’impact sur le droit au logement. Chaque organisation devra proposer un papier d’une ou deux pages à partir d’un petit questionnaire dans son pays d’ici au mois de juin afin de publier une brochure pour la rencontre d’octobre. Une personne pourra être recrutée pour un mois pour aider à finaliser ce document
  • Le groupe de travail sur le logement social et public a réuni de nombreuses personnes intéressées et a prévu de se retrouver en juin pour travailler sur les suites à donner, à partir du travail entrepris en 2019, notamment par les amis roumains de Social Housing Now ! et qui sert de base pour la suite (voir manifeste 2019). Les tendances européennes sont partagées dans de nombreux pays : privatisation et appel aux investisseurs privés pour le logement social, dégradation des conditions de vie des locataires et hausse des charges, tendance à la spécialisation du logement social pour les très pauvres et généralisation de l’accession à la propriété comme une politique « sociale » du logement, mais aussi des conditions d’accès de plus en plus difficiles face à la hausse des demandes qui excluent des personnes en difficultés. Un travail sur le financement du logement social est envisagé par ce groupe. Du 7 au 9 juin une rencontre aura lieu à Barcelone sur le logement social. Le syndicat des locataires de Barcelone y participera ;
  • Le groupe de travail sur la question de la lutte contre les expulsions a mis en commun différents outils locaux. Un guide européen contre les expulsions est envisagé, notamment sur l’organisation des mobilisations locales ;
  • Le groupe de travail sur les syndicats de locataires s’est mis d’accord sur une approche commune de « lutter avec et non pour les gens » et a convenu de conduire une recherche dans les pays respectifs au sujet des grands propriétaires immobiliers et notamment les propriétaires transnationaux, en vue de la rencontre de Paris ;
  • Le groupe de travail sur la fin du sans-abrisme a quant à lui abordé la question de la mobilisation entre pairs et du lien avec les travailleurs sociaux. Il a convenu de travailler sur une plus grande mobilisation des personnes sans-abris ou ayant vécu une expérience de sans-abrisme au sein de la coalition ;
  • Le groupe de travail sur le féminisme a convenu de mettre à jour le Manifeste. L’aitec a proposé de pouvoir inclure plutôt l’approche féministe dans la refonte du manifeste global qui pourrait être adopté à Paris. Stela du DAL coordonne ce travail de refonte du manifeste.
  • La mobilisation pour le MIPIM cette année a en partie échoué du fait de la difficulté de se rendre à Cannes à cause des grèves et des annonces de répression du mouvement, mais aussi de la faiblesse du mouvement social local pour accueillir les militants anti-MIPIM dans le contexte des grèves. Les militant·e·s de la coalition reconnaissent toutefois l’importance stratégique de ce sommet pour dénoncer leurs « ennemis » communs et ont apprécié le wébinaire en amont qui a permis de comprendre ce qu’était le MIPIM. Il est décidé de faire du MIPIM 2024 un moment fort de l’action de la coalition, sur place mais aussi en amont en interpellant les maires et les entreprises qui y participent ;
  • Sur la question des liens avec la question écologiques, l’atelier auquel l’Aitec a participé a conduit à l’identification de pratiques concrètes d’alliances au niveau local. Il a été remarqué aussi par les camarades portugaises d’Habita que plus un es liens entre mouvement pour le droit au logement et l’écologie sont concrets, plus la mobilisation réussit. Ainsi à Lisbonne les liens ont été tissés autour de la question du coût environnemental du secteur de la construction et de la promotion immobilière ; en France les liens entre les processus d’accaparement des terres et la spéculation foncière autour notamment de grands projets inutiles a été mises en lumière ou encore les alternatives liées à l’auto-construction… Cet atelier a convenu d’organiser un wébinaire prochainement sur les liens entre mouvement écologistes et les mouvements de défense du droit au logement, avec des « experts » de l’Union européenne d’un point de vue environnemental. Un atelier aura aussi lieu à Paris où des mouvements seront conviés à débattre et à préparer le MIPIM (le mouvement « dernière rénovation », le collectif de lutte pour le triangles des Gonesses….)
  • Enfin, sur les finances, l’assemblée a approuvé le budget excédentaire et décidé d’allouer plus de ressources aux facilitateurs, dont les indemnités ont été réhaussées de 400 € à 600 €. Les éléments budgétaires n’étaient toutefois pas clairs et manquait de clarté.
  • Des groupes ont été contactés pour accueillir des volontaires : Habita à Lisbonne, Le Syndicat des Locataires de Barcelone, en lien avec l’ODESC, le mouvement Anti- Expulsion d’Athènes. Ces trois organisations pourraient être intéressées par l’accueil d’un volontaire E et P qui pourrait à son tour renforcer le travail de la coalition.

Les engagements de l’Aitec à discuter en Bureau

  • L’implication dans la préparation de la rencontre de Paris et l’engagement de l’Aitec dans l’organisation : qui et sous quelle forme ?
  • La participation plus générale dans des groupes de travail selon les expertises des membres de l’Aitec et notamment l’organisation du webinaire sur le foncier et l’engagement dans le groupe de travail sur le logement social et la refonte du manifeste
  • L’organisation de l’envoi d’un·e volontaire E&P


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