AITEC
Bouton menu

La représentation des usagers dans les services publics

Publié par , le 13 mars 2007.

Un enjeu stratégique de la régulation démocratique et de la modernisation des services publics

 Introduction
 Les attendus
 Orientations fondamentales
 Composition, organisation et fonctionnement des conseils locaux
 Le conseil national des services publics : principes de composition, d’organisation et de fonctionnement
 Le conseil départemental des services publics

Services publicsUsagers



Partager :

bouton facebook bouton twitter Bouton imprimer

Introduction

Le débat sur les services publics est un débat stratégique. Ce débat concerne l’efficacité économique et l’égalité des droits, la construction du lien social et la concurrence internationale, la démocratie locale et le développement durable. L’AITEC travaille depuis six ans sur ce thème, dans le cadre du réseau ICARE. Nous sommes partis d’une réflexion sur « Marché et démocratie ». Nous avons étudié l’évolution des entreprises des services publics dans différents secteurs (l’énergie, l’eau, les transports, les télécommunications, l’audiovisuel, le logement, la formation). Nous avons abordé les questions transversales des services publics locaux, de la citoyenneté, du droit des services publics. Nous avons esquissé une réflexion sur la théorie des services publics ; cette réflexion sera poursuivie dans un cadre universitaire.

Le mouvement social depuis 1995 a mis en avant la question des services publics. Nous avons apprécié, à cette occasion, la convergence entre les syndicats de travailleurs et les associations citoyennes.

La référence aux consommateurs - usagers - citoyens est devenue fréquente ; elle nous semble être une piste dans la recherche des alternatives à la problématique néo-libérale aujourd’hui dominante. La modernisation des services publics est une nécessité et un enjeu politique. La représentation des usagers est au coeur de la mise en place d’une régulation démocratique et de la modernisation des services publics.

L’AITEC a décidé d’avancer des propositions sur la représentation des usagers. Ces propositions seront discutées dans les associations du réseau ICARE et au-delà. Elles seront proposées aux représentants des usagers - consommateurs - citoyens, à savoir : les associations de consommateurs, les syndicats de travailleurs, les associations des élus locaux. Elles seront présentées et défendues à l’occasion des différents débats publics sur les services publics.

Dans le passé le législateur n’a pas été avare de propositions diverses de conseils, comités, sièges de conseils d’administration...destinés à représenter les usagers. La plupart de ces instances n’ont pas été mises en situation de fonctionner réellement et normalement. Nous faisons le pari qu’un réseau de conseils fortement charpenté et en charge de plusieurs services publics essentiels peut aujourd’hui trouver en lui même et dans le corps social sa propre dynamique.

Les attendus

La modernisation des services publics est à l’ordre du jour. La question des services publics est au centre du débat sur :

 l’efficacité économique et l’égalité des droits ;

 la construction du lien social et la concurrence internationale ;

 la démocratie et le développement durable ;

 l’évolution des rapports entre les échelles locale, nationale et européenne ;

La question de la modernisation des services publics oblige à prendre parti sur :

 la définition des missions de services publics et la garantie de l’accès aux services ;

 la décentralisation, le pouvoir des autorités locales et leur aptitude à porter des projets de développement local et territorial ;

 l’évolution des entreprises et les coûts des services, compte tenu des nouvelles règles de concurrence liées à la construction européenne.

Une partie du débat s’est déplacée vers la scène européenne. Il s’agit d’apprécier les conséquences de l’ouverture à la concurrence et de la mondialisation mais aussi des nouvelles formes de régulation économique et de protection sociale, sur le devenir des services publics. Il faut ici prendre l’Union Européenne au mot quand elle affirme se préoccuper de la défense des consommateurs.

La représentation des usagers est au coeur de la modernisation. La représentation à organiser est celle des bénéficiaires des prestations des services publics qui jusqu’ici n’ont pas eu véritablement droit à la parole ou en tout cas ne se sont pas fait suffisamment entendre. Ces bénéficiaires sont :

 les usagers des services, les utilisateurs directs des prestations disposant de droits à faire valoir (usagers domestiques et clients professionnels ou consommateurs intermédiaires) ;

 les consommateurs groupés en organisations attentives à la qualité, au juste prix et au respect des engagements "commerciaux" des producteurs de services ;

 les citoyens (au sens figuré ou large, nationaux ou non) soucieux de cohésion sociale, acteurs du développement local, défenseurs d’une bonne gestion de l’environnement et du cadre de vie.

Il faut distinguer les fonctions et intérêts pris en charge par ces bénéficiaires de leur statut ; ils peuvent être de simples particuliers membres d’associations, des syndicalistes, des élus locaux... Cette représentation des usagers - consommateurs - citoyens ne vient pas se substituer à la représentation élective républicaine, elle la complète. La contribution des usagers à la régulation des services s’ajoute au pouvoir délibératif des assemblées nationales et locales.

Orientations fondamentales

1. Les services publics sont placés institutionnellement sous la responsabilité des collectivités publiques territoriales (Etat, Région, Département, Commune...) et de leurs assemblées délibératives (assemblée nationale, sénat, conseil régional, conseil général, conseil municipal...) en tant qu’initiateurs, organisateurs, contrôleurs, tutelles...formant un ensemble d’acteurs que l’on peut dénommer "pouvoirs publics".

Ces mêmes services publics sont gérés par des administrations, des établissements publics, des sociétés d’économie mixte, des entreprise publiques ou privées que nous qualifierons d’ "opérateurs".

La bonne marche de ces services publics et leur avenir comme forme moderne d’organisation sociale ne peuvent être assurées qu’avec la participation des "bénéficiaires" : les "usagers - consommateurs - citoyens".

Ces derniers n’ont pas vocation à diriger ou à co-diriger le processus de production du service lui-même qui obéit à sa propre logique institutionnelle, technologique et managériale. Ils ont en revanche vocation à former, avec les pouvoirs publics et les opérateurs, des conseils qui sont des espaces et des instances d’information, de confrontation, d’interpellation, de proposition et d’évaluation publique et contradictoire.

2. Les services qui se prêtent le mieux à une telle innovation sont, à ce jour et d’après nous, les services publics industriels et commerciaux ou marchands suivants :

 l’électricité et le gaz ;

 l’eau et l’assainissement ;

 les transports de personnes dont les transports urbains ;

 l’enlèvement et le traitement des ordures ménagères ;

 les télécommunications ;

 la poste.

3. Les conseils à instituer fonctionneraient à la fois comme conseils de chaque grand service ou sous-ensembles de services (le conseil de l’électricité et du gaz, le conseil de l’eau et de l’assainissement, le conseil des transports de personnes et urbains...) et comme conseils de l’ensemble des services dont la contribution est globalement déterminante pour la qualité de la vie. Chaque conseil est donc composé d’une assemblée multiservices et d’une section par service.

4. Ces conseils sont :

 des conseils locaux

 un conseil national

5. Les conseils locaux sont institués au niveau départemental. Le département est un échelon qui bénéficie d’une histoire dans la représentation des associations et des syndicats. C’est aussi, avec la présence des Préfets, un échelon territorial efficace de l’action de l’Etat, dont il est attendu qu’il joue pleinement son rôle en ce qui concerne notamment les garanties d’accès aux services. Les opérateurs peuvent aussi, à cette échelle, répondre de leur intervention dans la distribution et l’accès aux services. Dans certains cas, par exemple pour les transports de personnes, les sections tiendront compte des autres échelons, intercommunaux ou régionaux.

6. Le conseil national comme les conseils locaux :

 s’assurent du respect des principes d’universalité, d’égalité, de socialité, d’adaptation et de productivité régissant les services publics ;

 donnent des avis sur les programmes d’investissement, l’organisation des services et leur politique tarifaire ;

 mènent des études, conduisent des enquêtes et réalisent des expertises sur :

à l’offre de service en quantité et en qualité ;
à l’accès au service des usagers en difficulté économique ou situés dans les zones défavorisées ou isolées.

à la contribution des services publics au développement local durable, à l’emploi et à la protection de l’environnement

7. Le conseil national comme les conseils locaux examinent les réclamations des collectivités publiques, des opérateurs ou du public fondées sur une méconnaissance ou une mauvaise application des principes régissant les services publics et des engagements contractuels souscrits par les parties, relatifs à la quantité, à la qualité et à la localisation du service fourni.
Les séances des conseils sont publiques. Les compte-rendus de leurs débats et travaux sont publiés et largement diffusés.

8. Les conseils, dont notamment les conseils locaux, décident d’allocations financières (études, investissements) à certains projets :

 d’amélioration des services publics ;

 de développement local et de création d’emplois ;

 d’actions en faveur de l’environnement.

9. Les conseils et le conseil national assurent la formation de leurs membres, supportent leur frais de fonctionnement et d’expertise, indemnisent les déplacements et rémunèrent leurs membres associatifs et syndicalistes.

10. Les conseils disposent de la personnalité juridique, de l’autonomie financière et de ressources propres prélevées sur le chiffre d’affaire des services, le montant de leurs investissements, et leurs gains de productivité. A titre d’illustration, une contribution de 1% sur les dépenses d’exploitation des services d’électricité, de gaz, d’eau et d’assainissement et de 5% sur les dépenses d’investissement local dans la distribution de ces services alimenterait un fond annuel de 15 millions de francs, en moyenne, par conseil départemental.

Composition, organisation et fonctionnement des conseils locaux

Le préfet préside le conseil départemental des services publics. Il représente l’Etat en tant qu’il est le garant des conditions du bon fonctionnement des services publics et de la bonne exécution des missions que la loi leur confère. Au président sont adjoints deux vice-présidents élus par les membres du conseil, l’un est un élu local, l’autre est un représentant des organisations des usagers domestiques.

Le préfet désigne les représentants des administrations d’Etat.

Le président du conseil régional et le président du conseil général désignent les représentants des collectivités territoriales qu’ils président.

Le président du conseil régional et le président du conseil général proposent à la nomination du préfet, pour siéger comme membres du conseil local des services, des représentants des exécutifs et administrations communales :

 des maires ;

 des administrateurs et techniciens communaux ;

 des responsables d’établissements de coopération intercommunale.

Le conseil régional et le conseil général désignent les représentants de leurs assemblées.

Le conseil général désigne les conseils municipaux qui auront à déléguer certains de leurs membres pour faire partie du conseil départemental des services publics.

Le préfet nomme les représentants des opérateurs publics et privés.

Les représentants des usagers et assimilés et des syndicats sont élus. Plusieurs modalités d’élections directes sont envisageables ; l’élection des représentants des usagers pourrait s’inspirer des élections prud’homales auxquelles elles pourraient être associées. Dans un premier temps, si l’organisation de telles élections s’avérait trop complexe, il serait demandé aux organisations représentatives qu’elles désignent elles-mêmes leurs délégués.

Les organisations d’usagers invitées à présenter des candidats à l’élection ou à désigner leurs délégués sont préalablement agréées.

Les organisations en question sont les organisations d’usagers domestiques, d’usagers professionnels, de protection de l’environnement, d’amélioration du cadre de vie et de promotion du développement local.

Les syndicats sont les syndicats représentatifs nationaux et les syndicats représentatifs au niveau départemental.

Le conseil local est divisée en sections à raison d’une section par domaine de compétence :

 section 1 : eau et assainissement ;

 section 2 : enlèvement, transport et traitement des ordures ménagères ;

 section 3 : énergie ;

 section 4 : transports terrestres de personnes.

 section 5 : télécommunications ;

 section 6 : poste

Chaque section comprend une vingtaine de membres dont un président et deux vice-présidents élus par les membres de la section et parmi eux. Le collège des usagers dispose de sept sièges. Le président ou l’un des vice-présidents sont choisis parmi les membres du collège des usagers.

Les présidents et vice-présidents de section forment, avec le préfet président du conseil et les deux vice-présidents du conseil, le bureau. Celui-ci a mission de répartir les dossiers (les affaires à traiter) entre les sections, qui sont les chevilles ouvrières de l’instance consultative. Toutes les affaires dont est saisi le conseil sont instruites par une ou plusieurs sections. L’assemblée délibère sur le rapport de la section qui a instruit le dossier. Seule l’assemblée est compétente pour engager l’institution. L’assemblée est formée du bureau, des présidents et vice-présidents de section et des délégués des sections désignés spécialement pour participer aux délibérations de l’assemblée. Chaque section envoie deux délégués. Les rapporteurs ne prennent pas part au vote.

Le conseil national des services publics : principes de composition, d’organisation et de fonctionnement

L’instance nationale est principalement l’organe de représentation placé auprès de l’Etat en tant qu’il définit les règles du jeu, les objectifs à atteindre, et les équilibres à préserver ou à instaurer. Elle est conseiller du gouvernement et ses pouvoirs de décision ne peuvent être que très restreints. Le conseil national ne substitue pas aux organes de régulation existants pour les différents services ; il les conseille.

Premier principe : on reproduit ici la structure : sections - assemblée délibérative .

Deuxième principe : le premier ministre est président du conseil national alors que les ministres ou leurs représentants président ou co-président (si plusieurs ministres sont concernés) les sections correspondant à leurs domaines de compétence.

Troisième principe : les membres de l’instance nationale sont nommés par le premier ministre sur proposition des ministres qui président ou co-président les sections.

Quatrième principe : chaque section de l’instance nationale élit un premier vice président et deux deuxième vice présidents qui, toutes choses égales par ailleurs, remplissent les fonctions des présidents et vice présidents de section des instances départementales.

Cinquième principe : chaque instance départementale est en mesure de saisir l’instance nationale d’un dossier particulier, d’une demande d’avis...

Sixième principe : l’instance nationale dispose d’un secrétariat permanent dirigé par un secrétaire général assisté d’un délégué à la liaison avec les instances départementales et d’un délégué à l’action internationale.

Le conseil départemental des services publics

Une assemblée multi-services

Six sections : énergie (gaz et électricité) - eau et assainissement - enlèvement, transport et traitement des ordures ménagères - transports terrestres de personnes - télécommunications - poste

1. Domaines de compétence

Conditions du service à la clientèle : segments prioritaires à développer (relevés, conditions de facturation, contact, accueil, conseils, implantation territoriale), qualité des services (satisfaction des usagers, qualité de la continuité...), organisation et fonctionnement des services...

Accès au service des zones défavorisées et des ménages en grandes difficultés

Contribution au développement local, à l’aménagement du territoire, à l’emploi, à l’environnement.

2. Pouvoirs

Avis-recommandations sur les conditions du service, l’accès au service, le développement local, l’aménagement du territoire, l’emploi, l’environnement

Pouvoir d’examen suspensif dans certains cas précisés par le réglement intérieur des sections

Pouvoir d’interpellation et de publicité

Etudes sur les conditions du service, l’accès au service, le développement local, l’aménagement du territoire, l’emploi, l’environnement

Décisions sur l’utilisation des fonds dédiés et capacité de décision juridictionnelle

3. Saisine

Toute personne peut saisir le conseil poue un avis, une réclamation, une proposition

4. Représentation

Le préfet représente l’Etat et désigne les représentants des administrations d’Etat

Le président du conseil régional et le président du conseil général désignent les représentants des collectivités locales qu’ils président

Le président du conseil régional et le président du conseil général proposent à la nomination par le Préfet des représentants des exécutifs et administrations communales : des maires, des administrateurs et techniciens communaux, des responsables d’établissements de coopération intercommunale

Le conseil régional et le conseil général désignent les représentants de leurs assemblées

Le conseil général désigne les conseils municipaux qui auront à déléguer certains de leurs membres pour faire partie du conseil départemental des services publics

Le préfet nomme les représentants des opérateurs publics et privés

Les représentants des usagers et assimilés et des syndicats sont élus. L’élection des représentants des usagers pourrait s’inspirer des élections prud’homales auxquelles elles pourraient être associées. A défaut d’une élection directe, les organisations représentatives désigneraient leurs délégués. Les organisations sont les associations d’usagers domestiques, d’usagers professionnels, de protection de l’environnement, d’amélioration du cadre de vie, de promotion du développement local. Les syndicats sont les syndicats représentatifs nationaux et les syndicats représentatifs au niveau départemental.

Chaque section comprend une vingtaine de membres dont un président et deux vice-présidents élus par les memebres de la section et parmi eux. Le président et un des vice-président sont choisis parmi les membres du collège des usagers, l’autre vice-président parmi les élus locaux.

Les présidents et vice-présidents des sections foirment, avec le préfet et deux vices-présidents (un membre du collège des usagers et un èlu local) élus par l’assemblèe, le bureau de l’assemblée.

5. Organisation et fonctionnement

Le bureau répartit les affaires à traiter entre les sections. un dossier peut-être soumis à plusieurs sections

L’assemblée délibère sur le rapport de la section, les rapprteurs de la section ne prennent pas part aux votes. Seule l’assemblée est habilitée à engager l’institution.

Les discussions publiques et contradictoires

Une expertise permanente (experts agréés et rémunérés par le conseil quand ils sont saisis) est constituée

L’évaluation engagée par le conseil est publique et contradictoire

La formation des membres du conseil est libre et payée (analogue à la formation des élus locaux)

Les membres du conseil sont défrayés, les représentants des usagers domestiques et assimilés et des syndicats sont rémunérés (sur la base d’un quart de temps plein)

Un fonds spécifique d’intervention est constitué ; il est alimenté par un prélèvement annuel de 1% sur les dépenses d’exploitation des services et de 5% sur l’investissement local de distribution (soit, en moyenne, 15 millions de francs par conseil départemental)