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Mutualisation associative & syndicale - Analyses

Publié par , le 19 mars 2007.





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En France, les "services publics" ont considérablement évolué ces dernières années, sous l’impulsion conjuguée de l’idéologie néo-libérale, de la mondialisation (ou globalisation) des économies, de l’évolution des technologies et de la construction européenne.

Aujourd’hui, pratiquement tous les "services publics" marchands (transports, télécommunications, poste, énergie, réseaux urbains) sont soumis à une forme de concurrence qui remet en cause les monopoles nationaux. Les "services publics" tels qu’ils se sont construits à la Libération, dans le rapport de forces de l’époque, subissent une profonde transformation : le pacte social conclu à l’époque se fissure.

Les "services publics" non marchands (administrations d’État ou locales, santé, justice, éducation, policeÉ) subissent aussi de fortes modifications, sous le coup notamment des restrictions budgétaires. Les dysfonctionnements y sont fréquents et structurels. L’externalisation (sous-traitance) des missions et des tâches ainsi que les privatisations sont de plus en plus fréquentes.

L’organisation jacobine (centralisée, hiérarchisée, bureaucratique) a petit à petit dissocié au sein des appareils verticaux (entreprises comme syndicats) l’activité des agents des comportements et attentes des usagers. Le caractère d’exception du droit public, tel qu’il s’est construit en France, est remis en cause par la construction européenne.

Résultat : les "services publics" correspondent de moins en moins aux besoins et souhaits de la société d’aujourd’hui. Ce délitement a détérioré leur contenu relationnel à l’usager, qui a souvent le sentiment d’arbitraire, source de discrimination et de dysfonctionnements profonds.

Par ailleurs, l’affaissement de la puissance publique à tous les échelons territoriaux et institutionnels conduit à l’émergence d’oligopoles qui tentent de maîtriser toute la chaîne des "services publics". Aujourd’hui, trois entreprises (Générale des eaux, Lyonnaise des Eaux, Bouygues) ont acquis une position dominante à partir de l’accaparement de la rente qu’ils se sont constitués sur l’eau et à travers une intégration horizontale dans les "services publics" locaux (transports urbains, câble, déchets, voirie, assainissement, équipements divers). Ils continuent à s’étendre à des secteurs nouveaux pour eux récemment "dé-réglementés" comme les communications ou même le transport ferroviaire inter-régional couvrant des territoires nationaux et internationaux.

Par leur puissance financière, par les liens qu’ils nouent avec les institutions (du plan local au niveau international), ces groupes menacent la liberté, le pluralisme de l’information et la démocratie elle-même, par leur intrication de l’économique et du politique.

Aujourd’hui, le poids des intérêts financiers sur les "services publics" est tel que leur démocratisation est indispensable à leur re-légitimation. Elles passent par la participation de tous les acteurs concernés (notamment les usagers et les agents des services) à la définition des missions et au contrôle et à l’évaluation des résultats.

UN DÉBUT DE CONVERGENCE

Bien que la situation des "services publics" soit encore mouvante et non stabilisée (tant au plan local que national ou européen) des convergences commencent à se dessiner entre ses principaux acteurs (agents, usagers, une partie des "technostructures", des élus, des expertsÉ).

Ces convergences portent sur :

 la place et le rôle des "services publics" (donc aussi ceux de la puissance publique) dans la cohésion sociale : Ils jouent un rôle essentiel comme élément concret de la citoyenneté et de l’intégration sociale ;

 la finalité du "service public", qui doit être l’usager-consommateur-citoyen, et le rôle actif que ce dernier doit jouer dans la définition des missions, le financement, le fonctionnement et l’évaluation. Cette conception du "service public" appelle à un véritable renouvellement de leur fonctionnement, de leur financement comme de leurs objectifs ;

 la nécessité d’une puissante régulation par la puissance publique de tous les "services publics", que l’entreprise qui les fournit soit publique ou privée. Car l’actuelle régulation interne à l’entreprise a démontré ses limites - voire sa faillite ;

 la nécessité de réflexions et de propositions afin d’éviter que quelques oligopoles privés ne dominent le marché des services ;

 l’importance du cadre européen pour organiser des "services publics" (ou services d’intérêt général ) qui donnent toute sa place à la puissance publique ainsi qu’à la citoyenneté européenne ;

 la nécessaire participation des salariés des services et de leurs organisations syndicales à la gestion, au fonctionnement et à l’évaluation des "services publics".

Des divergences subsistent sur :

 la façon d’aborder les inévitables contradictions et conflits d’intérêts qui peuvent surgir entre agents et usagers-consommateurs-citoyens, ainsi que le rôle des syndicats. Par exemple, la continuité du service public en cas de conflit est source de débat ;

 le rôle des associations de consommateurs et d’usagers, leur "représentativité". Sur le caractère essentiel de ce rôle pour que l’usager-consommateur-citoyen soit bien la finalité du "service public". L’usager individuel peut-il être un acteur collectif ?

 le rôle et la place des technostructures dans la crise actuelle des "services publics" - que ce soit quant à la légitimité, la gestion ou le financement ;

 la place, le contenu et l’évolution du "service universel" dans le cadre de l’Union Européenne.

C’est l’approfondissement de ces convergences et le débat sur les divergences entre tous les acteurs concernés qui permettront de forger l’alliance (le pacte social) indispensable à la construction des services d’intérêt général dans le cadre de l’Union Européenne et à chaque échelon territorial.