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La question foncière et de l’aménagement urbain

Publié par , le 12 novembre 2008.





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Gustave Massiah introduit la quatrième séance autour du Grand Paris. Aujourd’hui nous abordons les questions foncières au regard des problématiques d’intercommunalité avec Vincent Renard. Le foncier est au centre d’enjeux considérables. L’aménagement stratégique est en baisse alors que les mécanismes financiers liés au foncier augmentent. Si nous jetons un coup d’œil à l’histoire, nous nous apercevons que l’État a été volontariste depuis les années 30 avec des moyens financiers, techniques et juridiques. La révision des lois liées au foncier en 1976 marque la fin de cette période, ce qui a entraîné l’échec des schémas directeurs.

Etat des lieux

La crise à Paris s’aggrave. Le prix du logement évolue en fonction des territoires. Tous les rapports font état d’une saturation du centre avec une demande infinie et une offre fixe. Cela pose la question des mécanismes de régulation et d’une éventuelle structure juridique spécifique. L’essentiel du développement urbain se réalise dans les petites couronnes. Nous sommes entrés dans la formule du logement économique : la maison individuelle hors de toute opération d’aménagement organisée. C’est ce qu’on appelle le « diffus ». On a peu de réflexion à cette échelle.

Dans la pratique il n’y a pas de dispositif régulateur au niveau de la région. Le seul outil qui existe c’est le SDRIF, préparé par la région et qui doit être validé par l’État. Ce document est actuellement bloqué au conseil d’état car la droite prépare les régionales de 2010. L’Etat a nommé un secrétaire d’État à la région capitale (Mr Blanc), à ce jour ses déclarations portent seulement sur deux dossiers : le plateau de Saclay et la Plaine St Denis.

La mairie garde un rôle clef dans le foncier avec la prérogative concernant les permis de construire : c’est une arme absolue. Il y a un problème stratégique. Une commune n’a pas intérêt à produire des logements. Il y a un manque d’outillage interne pour la planification locative. Certes, il y a le Programme Local de l’habitat mais il faut un plan plus volontariste qui oblige par exemple les propriétaires de foncier à construire.

Une fiscalité locale complexe

Il existe une grande complexité de la fiscalité qu’il faut remettre à plat. Les lois sur les impôts fonciers datent de 1961 et 1971 (bâtit et non bâtit), et elles sont remise en cause par l’Union Européenne. Vincent Renard nous propose une piste de travail : supprimer la TFPB et la TFPNB, la taxe d’habitation (et éventuellement l’impôt sur les grandes fortunes versé à l’État) pour créer un impôt sur le patrimoine foncier au niveau de l’agglomération basé sur la valeur vénale. Il y a là un important gisement de financements pour les collectivités territoriales ; elles pourraient ainsi récupérer les plus-values liées à l’urbanisation. Pour preuve : en dix ans la valeur du patrimoine foncier a plus que doublé.

Commentaires généraux :

 Sédimentation des règles liées au foncier : il y a confusion dans la méthode de l’aménagement foncier. 6 lois sur le logement ont été votées en 7 ans dont 4 n’ont pas encore de décrets d’application. On fabrique des lois mais il n’y a pas de cohérence d’ensemble.

 Absence de cohérence entre les politiques urbaines et les politiques foncières : incitation à l’étalement urbain et dictature du parcellaire : on oblige les gens à bas revenus à habiter loin de la ville et éloignés des transports ce qui provoque une hausse du coûts des transports et du coût carbone. C’est une bombe à retardement.

 Il n’y a pas de politique foncière : la création de l’établissement publique Foncier d’Ile-de-France (EPFIF) a entraîné la création d’établissements publiques fonciers des Hauts-de-Seine, des Yvelines, du Val d’Oise...

 Le Droit de préemption. Lors d’une vente, la commune a la capacité de se substituer à l’acquéreur et de faire des propositions au niveau des prix. C’est une exception française. Il peut être utilisé au service d’une vision stratégique mais il existe aussi des dérives lorsqu’il est utilisé seulement pour « faire des coups ».

Débat

Les chiffres montrent que 65% de l’aménagement urbain équivaut à la construction de maisons individuelles - à 60% dans du diffus. Les ZAC ont été déclarées illégales par l’Union Européenne, ce qui a provoqué l’arrêt de ces opérations. Le rapprochement emploi/logement est devenu une illusion. La maison individuelle a ses limites : nous allons vers une situation de blocage avec le resserrement de l’octroi des crédits par les banquiers auprès des promoteurs et des particuliers. Nous devons nous attendre à une crise lourde en 2009. Le nombre des constructions est de 350 000 logements alors que l’objectif du gouvernement est de 500 000. La situation du logement social est critique. Le monde du HLM a une attitude ambiguë même s’il existe 850 organismes de logement social, et ils n’ont pas tous la même orientation. Le 1% logement ne correspond plus a rien : il est devenu une cagnotte dans lequel l’État se sert.

Nous avons perdu toute vision globale dans le cadre de l’agglomération parisienne. Les constructions attractives sont les bureaux. Cela créé de nouveaux problèmes comme à la Défense car les bureaux vieillissent vite et parfois mal, et il devient ensuite très coûteux de les réhabiliter. Dans l’agglomération parisienne les prix du logement ne vont pas s’effondrer, on va construire peu de logement et beaucoup de bureaux. Le logement n’est pas rentable. Il y a des territoires qui n’intéressent personne : les promoteurs vont là où c’est simple, ils ne s’aventurent pas dans des opérations complexes. Les territoires se spécialisent alors qu’il faudrait « mixer ». L’élu des petites communes n’a pas le pouvoir de faire face aux promoteurs.

Il n’y a pas de planification foncière à Paris, contrairement à Londres ou Dortmund, où les planners ont une grande influence sur l’aménagement. Le seul élément structurant qui impacte sur le foncier reste les transports (séance sur ce thème à venir). Il manque le métier d’urbaniste en France. Les agences sont seulement consultées et impactent peu sur la décision, à part peut-être à Rennes, Nantes et Lyon où il existe une stratégie urbaine ainsi qu’une bonne communication pour le faire savoir. La région est très faible. Le SDRIF est bloqué. Il n’y a pas de comptabilité entre le PLU et le SDRIF. Le SDRIF est une somme des documents stratégiques, on fait du collage... Le pouvoir urbain est éclaté.

La question du Grand Paris sans planification urbaine. Il existe un grand déficit démocratique. Si la vision planificatrice et stratégique n’a jamais été démocratique, aujourd’hui nous n’avons pas plus de démocratie et nous avons perdu la vision planificatrice et stratégique !

Documents à télécharger

  La ville saisie par la finance - Vincent Renard